J'appelle "société de provocation" toute société d'abondance supposée en expansion économique, qui pratique l'exhibitionnisme. Montrant ses richesses, elle pousse à la surconsommation par la publicité, les vitrines de luxe, les étalages alléchants, laissant en marge une fraction importante de la population. Son coté provoquant pousse à l'assouvissement de besoins réels ou artificiels en même temps qu'elle implique l'impossibilité pour certains de satisfaire cet appétit.
J'appelle donc "société de provocation" une société qui laisse une marge entre les richesses dont elle dispose et qu'elle exalte par le strip-tease publicitaire, par l'exhibitionnisme du train de vie, par la sommation à acheter et la psychose de la possession, et les moyens qu'elle donne aux masses intérieures ou extérieures de satisfaire les besoins artificiellement créés, en plus des besoins les plus élémentaires.
(Romain Gary) https://culturesco.com/.../romain-gary-histoire.../
Tout est dit. Une remarque : la possession des richesses doit s'accompagner de la connaissance et de l'instruction. Cette condition a été à peu près remplie jusqu'à l'émergence de la bourgeoisie capitaliste aux XVII° - XVIII° siècle. L'ancien système dans lequel la noblesse qui capitalisait le savoir transmettait d'une génération à l'autre (un gentilhomme "savait tout sans avoir rien appris"), les ordres monastiques faisant de même, a été supplanté par une démocratie qui, défiant l'économique n'a su tempérer ses excès par l'éducation populaire, que dans des périodes assez brèves, lorsqu'agissaient entre autres l'Abbé Grégoire, Jules Ferry ou, partiellement en France, les régimes communistes.
Aujourd'hui avec des écarts dramatiques tout le monde surconsommer à sa manière. Un exemple entre des millions : certains petits arroseurs pour l'agriculture ont un corps de plastique portant à son sommet un capuchon vissé qui se dévisse souvent avec le mouvement de l'eau. Une fois séparé du corps ce capuchon est perdu dans 90% des cas. Comme le fabricant ne vend pas le capuchon seul, on remplace le tout et l'ancien corps part au recyclage. De même pour des cadeaux de Noël en surnombre, même dans les familles les plus modestes qui "profitent" de honteuses "promotions" : des objets qui bourrent les déchetteries dès les premières semaines de l'année. En remontant l'échelle des revenus on arrive à la "journée des encombrants", par exemple à Lausanne où on peut s'équiper à peu de frais des derniers summums de le technologie.
Les petits enfants n'apprendraient chaque nouvelle qu'une fraction de ce qui restait à être enseigné à leurs prédécesseurs. Ainsi fabrique-t-on des produits humains que le marketing destine à tel ou tel cursus et la politique à un destin linéaire d'électeurs dociles sous la menace constante de leurs échéances de fin de mois.